Les Oliviers

– La mer, c’est moche et ça pue ! avait dit le petit.

Heureusement, la mère, occupée à fouiller dans les bagages, ne l’avait pas entendu. Sinon, c’était la gifle assurée.

Mais la grande pensa que le petit n’avait pas vraiment tort.

Il suffisait de regarder le pont du bateau. La cheminée qui crachait une fumée noire. Les familles entassés. L’odeur des corps. Le roulis. L’eau noire tout autour, plus sombre que la nuit au-dessus avec son ciel de tempête. Oui, c’était moche.

La grande attira le petit contre elle et elle sentit qu’il tremblait, autant de déception que de peur.

Quelques semaines auparavant, il avait laissé éclater des cris de joie quand la mère avait annoncé à ses trois enfants : « On va aller voir la mer ».

Le petit s’était tourné vers les deux sœurs, la grande et l’aînée, et il leur avait posé tout un tas de questions : « Elle est bleue, vraiment bleue ? » « Elle est froide, comme l’eau du lavoir ? » « Et de l’eau, y’en a beaucoup ? Beaucoup comment ? Plus que dans le lavoir ? »

La grande avait patiemment répondu à toutes les questions du petit.

L’aînée, elle, ne disait rien. Peut-être avait-elle déjà compris ?