TOUT VA BIEN


Je vous écris
pour vous dire
qu’ici tout va bien.
Comme d’habitude,
et contrairement à moi,
le matin s’est levé,
complètement à l’est
et de trop bonne heure.
Au réveil,
du jardin,
j’ai prudemment essuyé
la glace et les cernes.
Force est de constater
que ma tête,
malgré la nuit,
n’avait toujours pas fait
sa mise à jour.
Le chat s’en moquait bien :
son œil
sans-façon
m’a fait la fête.
Il faut que je vous dise
que je suis pour lui
une sorte de dieu
tapi au fond
d’une tasse
de croquettes.
J’ai déjeuné d’une brioche au cassis,
et d’un petit cœur de pierre
que j’ai laissé fondre
dans le thé
de la nuit diluée.
Le téléphone a ronronné
du bout des lèvres
une petite mélodie
qui égrenait patiemment
le décompte des jours et des joies.
Le soleil niché
sur les genoux,
j’ai écouté
la pelleteuse de l’horloge
croquer délicatement
les miettes des heures.
Après le déjeuner,
j’ai fait autour de moi
un petit paquet de laines
que j’ai refermé d’un nœud marin
sans doute d’eau bien trop douce
pour les tempêtes
qui en cette saison
sévissent
sous mes côtes.
C’est pour quoi
sur le chemin,
la houle de la forêt
a raboté
le bout de mon nez.
Mais ne vous inquiétez pas :
J’en achèterai un
la prochaine fois
où j’irai à la ville.
A présent la bûche
charbonne dans le poêle
et le chat sous ses cils
prie patiemment
pour que sa volonté soit fête
sur terre
comme dans sa gamelle.
Donnez-moi
aujourd’hui
le bol
de croquettes
qui m’appartient.
Quant à moi,
Je vous écris
pour vous dire
qu’ici tout va bien
puisque
vous m’aimez
et que
je vous aime,
tout va bien.