Les vitres

J’écris comme on fait les vitres.
Une fois l’an.
Pour casser la croûte de crasse
sur mes paupières closes,
chasser les hiéroglyphes moches
des chiures de mouches,
écailler l’éclair de sang
d’un rouge-gorge kamikaze,
gratter le goudron patiemment étalé
à la truelle des poumons,
dépoussiérer les toiles d’araignées
de toutes les heures perdues
à guetter un sourire, un chat, ton ombre
dans le brouillard
au fond de la rue.

J’écris
comme on fait les vitres :
Pour mieux y voir en-dedans.
Même si cinq minutes après,
j’ai beau frotter,
c’est toujours pareil :
il reste sur le verre
le soleil goguenard
des doigts poisseux
d’un enfant inconnu.